Né à Damas, de parents chrétiens, le futur André de Crète naquit et resta muet jusqu’à l’âge de sept ans. Lorsque ses parents l’amenèrent à l’église et lui firent recevoir la Sainte Communion, il se mit à parler. Telle est la force des Dons divins. A l’âge de quatorze ans, il se rendit à Jérusalem, puis fut tonsuré moine à la Laure de S. Sabbas le Sanctifié. Par la science et les labeurs ascétiques, il dépassa beaucoup de moines plus âgés et constitua pour beaucoup un exemple. Le patriarche le prit ensuite chez lui et le chargea de sa correspondance.
Lorsque commença l’hérésie des monothélites, qui enseignait que le Seigneur Jésus-Christ ne disposait que d’une seule volonté – divine – et non à la fois d’une volonté divine et humaine, comme l’enseigne l’Église, le VIe Concile Œcuménique se rassembla à Constantinople en 681, sous le règne de l’empereur Constantin Pogonate. Le patriarche de Jérusalem Théodore, ne pouvant se rendre au Concile, envoya à sa place André, alors archidiacre.
Lors du Concile, André manifesta des dons brillants, de l’éloquence et du zèle pour la foi, ainsi que du discernement. Après avoir œuvré afin que la foi orthodoxe s’affermît, il revint à Jérusalem à son poste. Plus tard, il fut élu à l’épiscopat et nommé archevêque de Crète. Comme archevêque, il fut fort apprécié du peuple. Il manifesta son zèle pour l’Orthodoxie et pourfendit toutes les hérésies.
Il accomplit de nombreux miracles par ses prières, mettant ainsi en fuite les Sarrasins. Il écrivit de nombreux ouvrages didactiques, des chants et des canons liturgiques, dont le plus célèbre est le Grand Canon, lu durant la première et la cinquième semaine du Grand Carême. S. André était tel « qu’en regardant son visage et en écoutant ses paroles douces comme le miel, chacun s’en réjouissait et se corrigeait ». Etant une fois de retour à Constantinople, il prédit sa mort avant d’atteindre la Crète. Et il en fut ainsi. Lorsque le navire s’approcha de l’île de Métylène, ce luminaire de l’Église rejoignit le royaume du Christ en 712.
Introduction au Canon de Saint André de Crète
Le Grand Canon de Saint André de Crète est une poésie liturgique byzantine qui s’est développée tout au long de l’histoire millénaire de l’Église indivise et un peu au-delà. Cette poésie prit naissance dans les pays de langue syriaque, autour des métropoles d’Antioche et d’Édesse. C’est au sixième siècle que la création poétique en langue grecque prit un essor particulier avec les kondakia de saint Roman le Mélode ; les hymnes de saint Jean Damascène leur succédèrent au siècle suivant.
À la fin du septième siècle apparaît une nouvelle forme de poème liturgique, sans doute moins bien construite que les compositions précédentes mais dont le contenu théologique est plus directement parlant : le » Canon poétique « . Le Canon se présente comme un long texte prenant la forme de neuf hymnes (odes), paraphrasant plus ou moins le texte des neuf cantiques scripturaires qui sont d’ordinaire chantés à l’office du matin (orthros byzantin – laudes occidentales).
À l’origine les strophes du canon (appelées tropaires) étaient intercalées entre les versets des cantiques, mais très rapidement l’habitude se prit d’omettre ces versets au profit du canon lui-même, seule la première strophe, appelée hirmos (du grec, » allusion, mention, convention « ), réfère directement au texte du cantique. L’hirmos, dans la langue originale, sert de modèle métrique à tout l’ensemble de l’ode. Dans la présente version du Grand Canon de saint André de Crète, les références aux cantiques se trouvent au début de chaque ode. Les odes du canon se terminent par une strophe particulière nommée doxastichon, une louange à la sainte Trinité.
Usage liturgique
Dans le rite byzantin, le Grand Canon a été recueilli dans le Livre du Triode, ensemble des offices du Grand Carême. Il est récité à l’office des Grandes Complies les lundi, mardi, mercredi et jeudi de la première semaine de Carême, à raison d’un quart du texte environ par jour. Il est repris intégralement aux matines du jeudi de la cinquième semaine.
Le texte que nous présentons est la traduction des moines orthodoxes de l’Abbaye Saint-Michel de Bois-Aubry, effectuée en 1992. Cette traduction utilise comme source le texte grec en usage dans l’Église de Constantinople et édité à Athènes en 1953. Cette version signale les principales références bibliques ; les lecteurs avertis en découvriront d’autres qui ne sont pas signalées, en particulier les nombreuses paraphrases psalmiques. L’édition du Grand Canon de l’Abbaye Saint-Michel de Bois-Aubry tient compte du découpage original du texte en Odes par l’auteur.
La présente publication est divisée en quatre parties pour usage aux offices des Grandes Complies de la première semaine du Carême, tout en gardent la numérotation des strophes de l’édition de Bois-Aubry. Pour compléter l’usage du Grand Canon aux Grandes Complies, les louanges mariales et les invocations à saint André de Crète qui terminent chaque ode, ainsi que les invocations à sainte Marie l’Égyptienne, de même que certains louanges trinitaires, ont été ajoutées au texte du Grand Canon. Ces strophes sont tirés du Triode de Carême, tome 1 (Collège Grec de Rome, 1978).
Le commun de l’office des Grandes Complies se trouvent dans le Grand livre d’heures (Diaconie Apostolique, Rome, 1989).