Orantes de l'Assomption
Présence contemplative au cœur du monde
Rien n’est bon comme le détachement de soi-même, rien n’est déplorable comme la paresse spirituelle, j’en sais quelque chose---------Offrez-vous tous les matins et ne vous reprenez pas dans la journée---P. François Picard///////Il y a toujours à supporter, et tout le monde fait supporter. Il faut savoir se supporter mutuellement avec beaucoup de bonté, de patience, mais en même temps d'austérité de langage, avec l'affection des personnes données à Dieu---------- Je voudrai que pour nous prière et acte d’amour fussent synonymes----Mère Isabelle

Le publicain devenu un homme juste, et non le pharisien

Le pharisien et le publicain

Tout disciple, qu’il soit «bon pratiquant» ou «pécheur type», peut se sentir visé par la Parole de Dieu Luc18, 9-14 : le publicain et le pharisien. Jésus s’adresse d’abord à ceux qui se confient en eux-mêmes parce qu’ils s’estiment justes. Être sûr d’être juste, n’est-ce pas l’obstacle principal à la confiance en Dieu et donc à la prière?

« En ce temps-là, à l’adresse de certains qui étaient convaincus d’être justes et qui méprisaient les autres, Jésus dit la parabole que voici : « Deux hommes montèrent au Temple pour prier. L’un était pharisien, et l’autre, publicain (c’est-à-dire un collecteur d’impôts). Le pharisien se tenait debout et priait en lui-même : “Mon Dieu, je te rends grâce parce que je ne suis pas comme les autres hommes – ils sont voleurs, injustes, adultères –, ou encore comme ce publicain. Je jeûne deux fois par semaine et je verse le dixième de tout ce que je gagne.” Le publicain, lui, se tenait à distance et n’osait même pas lever les yeux vers le ciel ; mais il se frappait la poitrine, en disant : “Mon Dieu, montre-toi favorable au pécheur que je suis !” Je vous le déclare : quand ce dernier redescendit dans sa maison, c’est lui qui était devenu un homme juste, plutôt que l’autre. Qui s’élève sera abaissé ; qui s’abaisse sera élevé. » Évangile selon saint Luc 18, 9-14

 Qui d’entre nous, au cours d’un moment difficile de sa vie, ne s’est jamais demandé « Mais qu’est-ce que j’ai fait pour mériter ça ? » Nous sommes nombreux, nombreuse à nous poser furtivement cette question dans la difficulté.

L’Evangile d’aujourd’hui nous libère de cette inquiétude qui pourrait être le lit fertile des superstitions et autres endoctrinements dangereux. Cette libération est mise en scène par la parabole que Jésus adresse à des personnes qui, elles ne se posent jamais cette question ! Présentons les personnages : le pharisien. Exemple de piété personnelle, il porte aussi le souci du salut de son peuple, c’est pour cela qu’il jeûne plus souvent que prescrit par la loi religieuse et s’en attribue du mérite. Le publicain : collecteur d’impôts pour l’occupant romain mais aussi pour lui-même, il est celui qui s’enrichit en collaborant avec une puissance occupante. L’image même de la personne peu recommandable donc. Pourtant, dans les deux cas la sincérité de leur prière n’est pas à remettre en cause.

 Alors qu’est-ce qui les différencie assez pour que l’un soit justifié plutôt que l’autre ? C’est la certitude chez le pharisien de mériter par ses œuvres de piété l’amour de Dieu et son salut. Le publicain n’est sûr que d’être pécheur et de devoir demander à Dieu son amour, sa pitié.

Ainsi nous dit l’Evangile, ce n’est pas une relation mathématique ou logique qui nous relie au salut mais une relation d’amour. Ne pense pas que tes actions engagent Dieu mais pense, par tes actions, à t’engager dans la relation avec Dieu. Ainsi nous, nous pouvons être sûrs d’une chose : nos épreuves de vie ne sont pas une rétribution pour nos actions quelles qu’elles soient de même que, dans la joie, nous savons qu’il s’agit d’un don de Dieu, de son amour qui s’exprime librement dans nos vies. Au cœur de la joie nous pouvons nous tourner vers l’Eternel et lui rendre grâce pour ce don, au cœur de l’épreuve nous pouvons encore nous tourner vers lui et lui rendre grâce pour la force qu’il nous donne d’y faire face. « Je bénirai l’Eternel en tout temps dit le psalmiste, sa louange sera continuellement dans ma bouche ! »

Réflexion

  1. Cette parabole est adressée à un public très particulier : ceux qui se croient justes. Le pharisien était sans doute quelqu’un de très bien, un homme intelligent, généreux, prêt à se sacrifier. Et pourtant, sa prière dans le Temple n’a pas été exaucée. Pour les auditeurs de Jésus, cette parabole devait rappeler l’histoire de Caïn et Abel. Caïn offrait au Seigneur les premiers fruits de sa récolte, il n’avait rien à se reprocher, il se croyait juste. Mais le Seigneur n’a pas regardé son offrande. Le pharisien me rappelle aussi le jeune homme riche que Jésus rencontrera un peu plus tard. Celui-ci respectait tous les commandements, il était bien conscient de sa vertu, il se croyait juste. Mais il n’aura pas le courage de suivre le Christ.
    Le pharisien, Caïn et le jeune homme riche se croyaient justes, mais c’est une justice qu’ils attribuaient à leurs propres mérites. Pour eux, Dieu était quelqu’un qui exigeait des sacrifices, un maître sévère à qui ils devaient prouver leur valeur. Est-ce que, moi aussi, je crois que ma justice dépend exclusivement de mes efforts ? Ou bien ai-je compris que la seule chose que le Seigneur désire, c’est que je lui montre mes mains vides et que je lui demande de m’aider ? Il désire me rendre juste, me sanctifier. Il n’attend qu’une seule chose : que je cesse de me croire le responsable ultime de ma perfection, et que je me laisse humblement modeler par lui.
  2. Le publicain, lui, ne pouvait pas se vanter des vertus du pharisien. En tant que collecteur d’impôts, il était non seulement un traître au service de l’occupant romain, mais aussi probablement un voleur qui profitait de son métier pour « s’en mettre plein les poches ». Ses péchés auraient pu l’isoler dans une croûte d’égoïsme, le rendre indifférent envers Dieu et les hommes. Mais ce n’est pas ce qui est arrivé. Qu’est-ce qui a bien pu l’encourager à monter prier au Temple ? Eh bien, ce sont précisément ses péchés qui lui ont servi de tremplin pour monter vers Dieu. « Là où le péché s’est multiplié, la grâce a surabondé. » (Rm 5, 20). Il a pris conscience de son péché, c’est pourquoi il a pu reconnaître son besoin de miséricorde. Et le Seigneur n’attendait que cela pour le combler de la justice divine.
    À chaque fois que je participe à la sainte messe, je retrouve sur mes lèvres la prière du pharisien : « Seigneur, prends pitié ! » Le Seigneur n’attend pas que je lui montre mes vertus et mes efforts, qui seront toujours ridiculement petits à ses yeux. Ce qu’il attend, c’est que je lui montre ma misère et que je lui crie ma soif de miséricorde : « Kyrie, eleison ! » Alors, il pourra déverser sur moi les flots diluviens de son amour.
  3. Finalement, cette parabole offre aussi un résumé de l’histoire du salut. Le pharisien représente Adam, qui voulait être comme Dieu. Il ne voulait devoir son salut qu’à lui-même. En tant que fils d’Adam, j’ai hérité de cette méfiance envers Dieu, que je considère comme un obstacle à ma liberté. Je prétends me débrouiller moi-même, sans Dieu.
    Le publicain, lui, représente le Christ, le nouvel Adam, celui qui rétablit le pont que le péché originel avait rompu entre l’homme et Dieu. Le Christ s’est chargé de mes péchés, il a revêtu toute la misère humaine pour implorer à ma place la miséricorde du Père. Et sa prière a été exaucée. Il m’a obtenu le salut, la vraie justice dont parle la parabole. Il ne tient qu’à moi de l’accepter. Encore faut-il que je prenne conscience de mon besoin de miséricorde.

Prière

Seigneur Jésus, comme les deux hommes de la parabole, je viens en ta présence pour prier ! Même si ma prière n’a pas lieu dans le Temple de Jérusalem, mais simplement dans le sanctuaire intérieur de mon cœur, je sais que tu m’écoutes. Je sais que tu veux me parler. Aide-moi à entendre ta voix, Seigneur ! Sainte Vierge Marie, apprends-moi à écouter humblement la voix de ton Fils !

Demande

Seigneur, montre-toi favorable au pécheur que je suis !