Le temps du carême nous est offert pour nous préparer à vivre le mystère pascal, le cœur de notre foi.
A nouveau, nous entendons les moyens spirituels pour vivre ce moment privilégié de l’année liturgique : la prière, le jeûne, le partage. Les trois sont liés et s’appellent mutuellement. Le Pape François nous le rappelle dans son message de carême 2024 : ce « ne sont pas trois exercices indépendants, mais un seul mouvement d’ouverture, de libération: finies les idoles qui nous alourdissent, finis les attachements qui nous emprisonnent.” «A travers le désert, Dieu nous guide vers la liberté». Tel est l’intitulé du message pour le carême 2024. S’appuyant sur le livre de l’Exode, le pape François présente le Carême comme un temps de conversion qui nous libère de nos esclavages et nous ouvre à l’espérance. L’invitation à la prière retentit cependant de manière particulière cette année 2024, année de la prière, pour nous préparer au grand jubilé de l’Eglise 2025 : « Témoins de l’espérance ».
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«Je suis le Seigneur ton Dieu, qui t’ai fait sortir du pays d’Égypte, de la maison d’esclavage». C’est à partir de ce verset du livre de l’Exode (20,2), qui ouvre l’épisode du Décalogue donné à Moïse sur le Mont Sinaï, que François développe sa méditation. Le contenu du Décalogue – les « dix commandements » – est un «appel vigoureux à la liberté», explique-t-il d’emblée dans son message. «Le Carême est le temps de la grâce durant lequel le désert redevient – comme l’annonce le prophète Osée – le lieu du premier amour».
De l’esclavage à la liberté
L’exode de l’esclavage vers la liberté est une démarche qu’il faut incarner concrètement. En ce sens, François insiste sur la nécessité de «voir la réalité», comme le Seigneur qui a su voir les misères des Hébreux en Egypte. Un chemin vers la réalité qui passe par des interrogations: “Aujourd’hui encore, le cri de tant de frères et sœurs opprimés parvient au ciel. Posons-nous la question: est-ce qu’il nous parvient à nous aussi? Nous ébranle-t-il? Nous émeut-il? De nombreux facteurs nous éloignent les uns des autres, en bafouant la fraternité qui, à l’origine, nous liait les uns aux autres.”
Pour le Saint-Père, le parcours du carême sera complet si «nous reconnaissons que nous sommes encore sous la domination du pharaon». «Une domination qui nous épuise et nous rend insensibles. C’est un modèle de croissance qui nous divise et nous vole l’avenir. La terre, l’air et l’eau en sont pollués, mais les âmes sont elles aussi contaminées.»
Un défaut d’espérance
Le pape s’arrête ensuite sur un détail du récit de l’Exode qui, a selon lui, une grande importance : c’est Dieu qui voit et décide de libérer, ce n’est pas Israël qui le demande. «Le Pharaon, en effet, anéantit même les rêves, vole le ciel, fait apparaître comme immuable un monde où la dignité est bafouée et où les relations authentiques sont déniées.» De nos jours, il constate le même «défaut d’espérance» : «il s’agit d’un obstacle au rêve, d’un cri muet qui monte jusqu’au ciel et touche le cœur de Dieu et ressemble à ce regret de l’esclavage qui paralyse Israël dans le désert, en l’empêchant d’avancer.» Pourtant, «l’exode peut prendre fin», nous encourage-t-il.
Le Carême est le temps de la grâce durant lequel le désert redevient – comme l’annonce le prophète Osée – le lieu du premier amour (cf. Os 2, 16-17). Dieu éduque son peuple pour qu’il sorte de l’esclavage et expérimente le passage de la mort à la vie. Comme un époux, il nous ramène à lui et murmure à notre cœur des paroles d’amour.
Accueillir le temps du désert
Le carême est un temps de conversion et un temps de liberté, poursuit l’évêque de Rome. «Jésus lui-même, comme nous le rappelons chaque année à l’occasion du premier dimanche de Carême, a été conduit par l’Esprit au désert pour être éprouvé dans sa liberté.»
Ainsi, pendant 40 jours, «il sera devant nous et avec nous: il est le Fils incarné. Contrairement au Pharaon, Dieu ne veut pas des sujets, mais des fils». Utilisons le désert comme un espace dans lequel «notre liberté peut mûrir en une décision personnelle de ne pas retomber dans l’esclavage», exhorte le pape. Il nous invite également à trouver «de nouveaux critères de jugement et une communauté» pour s’engager sur une route inédite. Ce nouveau chemin implique une lutte contre les idoles. Chacun peut s’accrocher à l’argent, à une position, des objectifs, une tradition… Qui «au lieu de nous faire avancer», nous paralysent.
La prière, l’aumône et le jeûne nous aident sur ce chemin. Ils « ne sont pas trois exercices indépendants, mais un seul mouvement d’ouverture, de libération: finies les idoles qui nous alourdissent, finis les attachements qui nous emprisonnent.”
« Cherchez et risquez »
La conclusion de ce message est destinée aux jeunes. Le pape reprend ce qu’il a dit aux universitaires lors des JMJ de Lisbonne en 2023 : «Cherchez et risquez. À ce tournant de l’histoire, les défis sont énormes, les gémissements douloureux. Nous assistons à une troisième guerre mondiale par morceaux. Prenons le risque de penser que nous ne sommes pas dans une agonie, mais au contraire dans un enfantement. Non pas à la fin, mais au début d’un grand spectacle. Il faut du courage pour penser cela».
Un temps pour s’arrêter
Il est temps d’agir, et durant le Carême, agir c’est aussi s’arrêter. S’arrêter en prière, pour accueillir la Parole de Dieu, et s’arrêter comme le Samaritain, en présence du frère blessé. L’amour de Dieu et du prochain est un unique amour. Ne pas avoir d’autres dieux, c’est s’arrêter en présence de Dieu, devant la chair de son prochain.
Au lieu de menaces et d’ennemis, nous trouvons en l’autre un compagnon de route. C’est le rêve de Dieu, la terre promise vers laquelle nous tendons une fois sortis de l’esclavage.