C’est la rentrée. Chaque année tout se bouscule en nous et autour de nous pour préparer la fameuse rentrée. Cette rentrée ne concerne pas uniquement ceux qui travaillent ou ceux qui étudient mais toute personne active physiquement, émotionnellement, intellectuellement, moralement et spirituellement. Etre actif veut aussi dire travailler ! Dans le texte qui suit, la philosophe Jeanne Larghero éclairera les petites et grandes questions sur l’essence du travail à la lumière de l’éthique chrétienne. Elle se demande ici quelles sont les conditions pour que son travail ait de la valeur.
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Tous ceux qui sont en recherche de reconversion professionnelle expriment une attente forte : exercer un travail qui ait du sens. Et de manière générale, toute activité jugée comme dépourvue de sens aux yeux de celui qui l’exerce se voit qualifiée désormais de bullshit job…
Que penser de ce niveau d’exigence ? Cela oblige bien évidemment à se recentrer sur ce qui fait la valeur fondamentale de notre travail.
S’il fallait retenir trois critères fondamentaux permettant d’apprécier la valeur du travail qui est le nôtre, quel qu’il soit, que pourrions-nous retenir ? Travailler, c’est faire quelque chose. Travailler, c’est faire quelque chose pour quelqu’un. Travailler, c’est faire ensemble quelque chose pour quelqu’un.
1. TRAVAILLER POUR FAIRE QUELQUE CHOSE
Tout d’abord, le sens d’une mission se mesure à son efficacité objective. Travailler, c’est faire quelque chose. Il importe que nous puissions mesurer le résultat de notre action, que nous puissions admirer la réalisation finie et que nous puissions y reconnaître le fruit de nos efforts, de nos compétences, ou de nos initiatives personnelles.
Lorsque nous avons le sentiment de n’être que le microscopique maillon, interchangeable qui plus est, d’une chaîne interminable d’interventions successives, alors le sentiment de contribuer à une œuvre se dissout, et la fierté de la réalisation personnelle ne trouve plus à s’exprimer.
Le sens de ce que l’on fait disparaît lorsque le sentiment d’efficacité propre diminue.
2. TRAVAILLER POUR QUELQU’UN
Travailler, c’est faire quelque chose pour quelqu’un. Ce que je fais est destiné à quelqu’un. Qui est bénéficiaire des efforts que je produis ? À qui mon travail apporte-t-il un bien nécessaire à sa vie, à son bien-être, à sa construction personnelle ? Dès lors que nous pouvons rencontrer, ou nous représenter ce quelqu’un pour qui nous nous sommes levés le matin, notre activité prend de la consistance à nos yeux.
En revanche, lorsque les bénéficiaires ne sont plus qu’une vague abstraction, une inversion se produit : le salarié devient à ses yeux et aux yeux des autres, un outil de la productivité de l’entreprise, un outil au service du profit de l’entreprise. Il importe non seulement de connaître le bénéficiaire, le client, mais également de pouvoir juger de l’utilité véritable de ce que nous lui apportons.
3. TRAVAILLER ENSEMBLE
Enfin, travailler, c’est faire ensemble quelque chose pour quelqu’un. Le goût que nous portons à notre métier, à notre travail n’est pas simplement affaire de conditions de travail, ou de salaire. Toute œuvre est une œuvre commune : un objet, un bien, un service n’est jamais le résultat d’un seul. L’essence même du travail humain est de créer un tissu unissant tous ceux qui contribuent à un bien commun et utile. Et parce que nous sommes des êtres de relation, le travail est un lieu d’accomplissement.
C’est pourquoi l’atomisation du travail engendre une perte de motivation : chacun a besoin d’être reconnu comme contributeur à une cause commune. Ainsi, il est juste d’affirmer qu’un travail qui a du sens est une activité dans laquelle chacun peut exprimer une efficacité propre, une utilité pour autrui, et bénéficier d’une reconnaissance de ceux qui y participent.
Jeanne Larghero, Philosophe dans Aleteia