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La fin de l’année liturgique : Nous sommes appelés à manifester la royauté du Christ par la fraternité
Les ultimes semaines de l’année liturgique ne se contentent pas d’égrener les dernières minutes qui restent à vivre. Veillez donc, car vous ne savez ni le jour ni l’heure (Mt 25, 13). Elles offrent une véritable pédagogie afin de saisir, alors que ces temps sont les derniers, comment le monde n’avance pas vers sa perte, mais vers la plénitude de la communion avec Dieu.
Certes le temps de pandémie, avec ses multiples conséquences humaines, économiques et sociales, peut donner à penser que le monde se disloque et se divise plus que jamais. Les différents passages de l’Écriture des dimanches à venir n’éludent pas cette inquiétude voire son caractère irrémédiable. Cependant, au milieu de ce fracas, surgit une invitation, toujours plus pressante, à la vigilance et à l’écoute de la venue du Seigneur. Voici l’époux ! Sortez à sa rencontre (Mt 25, 6).
Sortir ? Le terme biblique ne veut pas simplement désigner un déplacement physique, mais il possède une signification existentielle très ample.
C’est d’abord prendre le risque de quitter ses certitudes et son confort, sa tranquillité. À la manière dont Paul y invite les chrétiens de Thessalonique : vous n’êtes pas dans les ténèbres, […] vous êtes tous des fils de la lumière, des fils du jour (1 Thes 5,4-5). Ce n’est donc pas une fuite en avant, mais la manifestation de l’espérance dans laquelle nous avons été plongés au jour de notre baptême. Le Christ est ressuscité d’entre les morts, de même c’est dans le Christ que tous recevront la vie (1Co 15, 22).
Ensuite, comme les vierges sages de la parabole ou les serviteurs du maître parti en voyage, c’est veiller et attendre son retour, dans l’absolue certitude qu’il vient, et que rien ne retarde sa venue. Probablement que cette attente peut parfois sembler épuiser l’huile de nos lampes ou même éteindre notre vigilance. La confiance de l’époux demeure pourtant le seul et vrai combustible de ce feu intérieur que l’Esprit saint allume sans cesse en nous.
Enfin, sortir nous conduira vers ces prés d’herbe fraîche où le Seigneur sera le berger de confiance et paix, même s’il faut pour cela traverser les ravins de la mort (Ps 22). Habiter la maison du Seigneur et se tenir à sa table est l’objectif ultime. Ce n’est pas une promenade limitée géographiquement ou réduite à une méditation solitaire. L’itinéraire que les Écritures tracent est celui qui fera de chacun un membre du Peuple de Dieu, du Corps du Christ et un Temple de l’Esprit saint.
Alors, au terme du temps liturgique, la royauté du Christ se dévoile comme la réponse au trouble qui peut nous habiter devant les événements du monde, devant le manque de l’Eucharistie et du rassemblement ecclésial de la prière. Elle est une royauté de vie et de vérité, de grâce et de sainteté, de justice, d’amour et de paix (préface du Christ Roi de l’Univers). Dit autrement, avec les mots de Mathieu l’évangéliste, cette royauté sera celle de la fraternité. Chaque fois que vous l’avez fait à l’un de ces plus petits de mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait (Mt 25, 40).
La réponse au trouble ou au manque qui semble faire vaciller notre espérance et notre communion, c’est bien la fraternité. Elle devient la face visible de cette réalité invisible qu’est notre foi, et qui faisait écrire à François d’Assise la manière de la manifester dans l’aujourd’hui de notre vie :
« Seigneur, fais de moi un instrument de ta paix, Là où est la haine, que je mette l’amour. Là où est l’offense, que je mette le pardon. Là où est la discorde, que je mette l’union. Là où est l’erreur, que je mette la vérité. Là où est le doute, que je mette la foi. Là où est le désespoir, que je mette l’espérance. Là où sont les ténèbres, que je mette la lumière. Là où est la tristesse, que je mette la joie. O Seigneur, que je ne cherche pas tant à être consolé qu’à consoler, à être compris qu’à comprendre, à être aimé qu’à aimer. Car c’est en se donnant qu’on reçoit, c’est en s’oubliant qu’on se retrouve, c’est en pardonnant qu’on est pardonné, c’est en mourant qu’on ressuscite à l’éternelle vie. »
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Tout au long de ces semaines qui vont conduire chacun vers la fin de l’année liturgique, nous réapprendrons à dire la fraternité et l’espérance, dont l’Eucharistie est le sacrement. Son absence concrète élargira l’espace pour que la Parole du Seigneur achève en nous son œuvre de charité envers ceux qui nous entourent. La Bonne nouvelle du Salut n’est audible que lorsque les croyants sont capables d’en faire un récit qui entre en résonance avec l’histoire humaine, et d’agir en fonction de ces paroles d’espérance dans un engagement qui manifeste leur fraternité et la construit dans la société. En creux, cela nous invite à ne pas attendre le rétablissement des célébrations publiques pour proclamer le Christ-Roi. Vivre la fraternité sert l’avènement de la royauté du Christ et, par le témoignage ainsi donné, c’est déjà le « célébrer » aux yeux de tous !