Mère Isabelle-Marie de Gethsémani, fondatrice des Orantes de l’Assomption. Dans son expérience humaine et spirituelle, on voit en Isabelle une vraiment femme saisie par le Christ qui, par sa profondeur d’esprit nous laisse un modèle de vie humble et donnée qui peut nous édifier et nous encourager. Quelques aspects de sa vie peuvent spécialement éclairer notre chemin pendant ce temps de carême.
De la bienveillance
En ce temps de Carême, nous pouvons entrer dans la perfection de l’amour à travers la bienveillance et l’attention à l’autre dont Mère Isabelle nous donne l’exemple de manière cachée et simple. Dans son instruction intitulée « Notre Vénérée Mère et la vie commune », Mère Marie-Madeleine, ancienne supérieure générale, disait : Mère Isabelle était profondément humaine. Certes, Dieu lui avait accordé des dons précieux et variées : âme exceptionnelle, remarquable intelligence, cœur éminemment sensible et délicat, esprit fin et psychologue, tact exquis…
Mais notre vénérée Mère eut, comme tout le monde, à lutter contre ses tentations moins bonnes, et ce sont ces efforts persévérants dans l’amour de Dieu qui l’amenèrent à réussir si parfaitement sa personnalité… Dans la vie de communauté, sa charité se traduisait par une profonde tendresse envers ses filles que Notre vénérée Mère aimait « avec leurs défauts » selon son expression… Austère dans son affection… elle savait être maternellement bonne, intelligente des besoins du cœur de ses filles, de ceux aussi de leurs proches restés dans le monde.
Douée d’une fine psychologie, notre vénérée Mère savait qu’il y a un besoin légitime d’estime de soi en chacune de nous. Si elle ne prodiguait pas les compliments, par ailleurs, elle avait sa manière à elle de féliciter d’un travail, d’une réussite, d’une heureuse initiative. Et celle qui bénéficiait d’une parole bienveillante, d’un sourire satisfait, d’un clin d’œil approbateur et maternel se trouvait bien récompensée.
De son humilité
Des témoignages de ceux qui ont côtoyé Mère Isabelle, on retient que quand on l’approchait ce qui frappait le plus était son humilité, elle transpirait de toute sa personne, son maintien, ses paroles, sa manière de s’exprimer. Elle n’aimait rien pour elle, tout était pour le Seigneur, elle disait « Si vous voulez me faire plaisir, aimez beaucoup notre Seigneur ». Mère Isabelle fuyait les honneurs comme on fuit la peste, et comme les saints elle se réjouissait des humiliations…
Elle aimait et recherchait tout ce qui était humble. Une sœur se rappelle que Mère Isabelle était parmi elles celle qui sert. Elle mettait en garde contre une fausse spiritualité qui se contente de la spéculation et répétait que la sainteté est un labeur, un travail sur les défauts. Comme on l’avait bien remarqué, Mère Isabelle avait su conquérir, au fil des années, une profonde humilité contre sa nature fière… Sa conscience délicate était sans cesse en éveil contre les moindres imperfections, et ses derniers efforts, furent de mourir à tout orgueil.
Humble et large dans ses opinions, prenant volontiers conseil des plus jeunes sœurs, ses décisions étaient mûrement pesées dans la prière ; rarement elle donnait une réponse immédiate, car alors, disait-elle on risque « d’agir par la volonté humaine et on n’a pas le temps de voir celle du bon Dieu ». Mère Isabelle ne voulait déplaire en rien notre Seigneur, elle s’en remettait à sa volonté dans tous les détails de la vie quotidienne si bien que, quand survenait un imprévu qui venait brusquement déranger son plan, elle aimait dire joyeusement « vous voyez, le bon Dieu défait tout ce que je fais ! »
De l’amour des pauvres
Pour Mère Isabelle, il est très clair, qu’« il ne suffit pas d’être pauvre, il faut aimer les pauvres…. » Il ne suffit pas de décider de vivre simplement, cela doit s’accompagner par l’amour concret des pauvres. Aux Orantes, Mère Isabelle répète « Il faut que vous ayez cet esprit de l’amour des pauvres, se greffant sur votre vie contemplative qui est votre vie principale. » Les deux vont ensemble pratiquer la pauvreté et aimer les pauvres.
Aux Orantes, Mère Isabelle, dans son instruction sur la pauvreté disait « Pour bien pratiquer la pauvreté, il faut avoir le dépouillement qui en résulte, ne pas se plaindre de petits ennuis, de privations, de choses moins commodes ; il faut savoir accepter cela, et d’être même quelquefois privée du nécessaire, car le jour où cela arrivera, il faut avoir l’habitude de la privation. Si nous nous examinions, nous verrions qu’il y a des choses auxquelles nous tenons: nous tenons à nos idées, aux choses auxquelles nous avons été habituées dans le monde.
Il faut apprendre à savoir se dépouiller, à avoir la bonne volonté de le faire, ne pas désirer plus qu’il ne faut, aimer sa pauvreté et prendre l’habitude de tous les petits actes que la pauvreté demande dans la vie religieuse. » Mère Isabelle ne dira jamais assez qu’en allant au pauvre on va à Notre Seigneur, elle dira à ses filles « Aimons le pauvre, travaillons pour les pauvres, et si nous nous trouvons en contact avec le pauvre, honorons en sa personne Notre-Seigneur Jésus-Christ. »
Il est vrai qu’à travers le pauvre, on s’efforce de transformer une réalité souffrante en une rencontre humaine où Dieu est présent. Ainsi, ne pas donner assez aux pauvres, refuser aux pauvres n’est pas vraiment dans l’esprit de l’Église, les saints ont aimé les pauvres, ils ont débuté dans l’amour de Dieu par le soin des pauvres. Notre amour pour les pauvres doit s’étendre jusqu’à la pauvreté non matérielle ainsi les soins donnés aux corps aidera à la transfiguration des âmes.
Alors que l’église nous invite à continuer avec zèle ce chemin du carême soutenus par l’aumône, le jeûne et la prière, Mère Isabelle nous encourage à avancer sur ce même chemin par une voie simple et concrète : dans la bienveillance, l’humilité et l’amour des pauvres.
Cfr, Collection Centenaire n°6, Une Femme Saisie par le Christ, Mère Isabelle 1849 – 1931