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En esprit et en vérité
« Tout est grâce ». Vraiment ? Les crises sanitaires, économiques ou socio-politiques que nous traversons avec leurs cortèges de morts, de souffrances et d’inquiétudes le seraient-elles aussi ? Il ne s’agit évidemment pas de prétendre que de telles circonstances sont bonnes ou positives, mais d’exprimer plutôt notre confiance dans la présence aimante du Seigneur à nos côtés, y compris dans les épreuves. Comme le dit saint Paul : « Nous savons que tout concourt au bien de ceux qui aiment Dieu » – Rm. 8,28 – Et même « là où le péché a proliféré, la grâce a surabondé » – Rm. 5,20.
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En esprit…
Dans les Derniers entretiens, ses confidences de malade en fin de vie, sainte Thérèse de l’Enfant Jésus écrit qu’un jour il ne lui était pas possible de communier car elle ne parvenait plus à déglutir et elle ajoute « Tout est grâce ». Elle exprime ainsi sa communion spirituelle à l’offrande du Christ qu’elle a vécue dans ce jeûne eucharistique obligé. Il ne s’agit nullement d’une relativisation du sacrement mais d’un approfondissement du désir qui renouvelle la foi, la charité et la profonde disponibilité à Dieu dans l’épreuve à vivre.
Le contexte sacramentel de ce premier « tout est grâce » est parlant en ce temps où nombreux sont les chrétiens et religieuses privés d’eucharistie. Tous, nous sommes invités à approfondir l’expérience de la communion spirituelle. Le jeûne des sacrements nous prive de leurs célébrations mais non de leur grâce d’union spirituelle au Christ… “Après toi languit ma chair comme une terre assoiffée” – Ps 62. Comme l’âme de la bien aimée qui cherche son bien-aimé dans le Cantique des cantiques, la communion spirituelle se vit comme le désir d’une présence, qui est celle du sacrement.
La prière de communion spirituelle est l’expression de ce désir. Jésus peut et veut se manifester à qui le désire et veut s’ouvrir à lui. Revenons à cet essentiel : le désir ardent de Dieu qui sanctifie et consacre par son Esprit, le pain, le vin et l’assemblée pour en faire son Corps. « Tout fidèle peut communier en esprit tous les jours, à toute heure, avec beaucoup de fruit. Il se nourrit invisiblement de Jésus-Christ celui qui médite avec piété les mystères de l’Incarnation et de la Passion et qui s’enflamme en son amour » affirme l’Imitation de Jésus-Christ – IV,10,6.
Le dimanche de Pâques est passé et tandis que l’octave se poursuit nous vivons une attente, celle de célébrations en Eglise retrouvées. C’est comme l’attente croyante et silencieuse du Samedi saint qui se prolonge ou même celle du Saint Esprit lorsque les apôtres demeuraient toutes portes closes dans la peur.
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… et en vérité
Les sacrements nous manquent ? La dimension d’Eglise aussi ? Tant mieux, c’est preuve de bonne santé. Profitons-en pour revivifier ces dimensions sans négligence ni catastrophisme. Si les sacrements sont très importants, ils ne sont toutefois pas le tout de la vie chrétienne et nous pouvons saisir cette occasion pour redécouvrir et exercer le sacerdoce baptismal. Approchez-vous du Seigneur …
Vous aussi, soyez des pierres vivantes qui servent à construire le Temple spirituel, et vous serez le sacerdoce saint, présentant des offrandes spirituelles que Dieu pourra accepter à cause du Christ Jésus. – 1Pe 2,4-5. Aujourd’hui, écrit Mgr. Rougé, « notre humanité tout entière est comme un grand corps malade, matériellement incapable de communier sacramentellement. Cela n’empêche pas ceux qui ouvrent leur cœur au Seigneur d’accueillir la grâce du Christ« .
En esprit par la communion spirituelle, en vérité par l’intercession sincère pour l’Eglise et par la disponibilité à se donner car « il nous offre sa vie et nous rend capables de donner la nôtre par Lui, avec Lui et en Lui. » Saisissons cette occasion de nous laisser convertir à plus de radicalité dans le don de nous-mêmes, conformément à notre profession religieuse. « Regardez les vrais héros, qui apparaissent ces jours-ci: ce ne sont pas ceux qui ont renommée, argent et succès, mais ceux qui se donnent eux-mêmes pour servir les autres. Sentez-vous appelés à mettre en jeu votre vie. N’ayez pas peur de la dépenser pour Dieu et pour les autres, vous gagnerez « Prenons ces deux choses dans nos mains : le crucifix pour le regarder et l’Évangile pour l’ouvrir. » – Pape François, semaine sainte 2020
Sœur Anne, Supérieure Générale des Orantes de l’Assomption